Une histoire de deux filles : Malala and Nabeela

Décembre 16, 2014 « ICH » – Malaya Yousafzai a reçu récemment le Prix Nobel de la paix, et chacun dans le monde chante ses louanges. Avec raison.
En fait, le cas de Malaya est probablement le seul où tous les médias semblent être en parfait accord, que ce soit Al Jazeera, ou Press TV ou même Fox News. Cette jeune fille mérite les éloges pour ses efforts.

Néanmoins, alors que Ms Yousafzai recevait son Prix Nobel, mon attention s’est portée sur une autre jeune fille du Pakistan : Nabeela Rahman. Tout comme Malala, Nabeela a aussi voyagé récemment dans la partie occidentale du monde bien que cette dernière soit allée aux USA dans un but tout-à-fait différent.

Nabeela…Qui ?

Retournons en octobre 2012. Quelque part dans le nord Waziristan, Nabeela Rahman, âgée de 8 ans avec ses frères et sœurs, avec leur grand-mère Momina Bibi, se préparaient pour le festival de l’Eid.

Apparemment, un Drone prédateur, peut-être le meilleur symbole de la liberté américaine de nos jours, avait décidé que Nabeela et sa famille étaient des menaces potentielles, et a lâché son chargement entier sur les civils sans défense. En un clin d’œil, le monde de Nabeela était détruit au-delà de toute réparation : sept enfants ont été blessés, et Momina Bibi, tuée sur le coup.

Revenons au présent. Nabeela, avec son père et son frère âgé de 12 ans ont voyagé récemment à Washington DC. L’objectif ? Elle cherchait des réponses.

Voici ce que le père de Nabbela avait à dire :

Ma fille n’a pas le visage d’une terroriste, et il en allait de même pour ma mère. Je ne comprends absolument pas pourquoi ceci est arrivé…comme enseignant, j’ai voulu instruire les Américains et leur faire savoir que mes enfants avaient été blessés.

5 représentants du Congrès sur 430 sont venus écouter Nabeela et sa situation désespérée. On aurait pu espérer une meilleure audience, mais bien, il se faisait que Nabeela (contrairement à Malala) n’était l’affiche d’une fille pour la propagande des bellicistes.

Les médias occidentaux ont couvert la visite de Nabeela, pourtant, et ont même souligné le fait que le traducteur a fondu en larmes en rapportant leur histoire. Cependant, comme prévu, le gouvernement américain a pensé qu’il était plus sage de l’oublier et de rester aussi muet que possible. Juste au cas où cela a de l’importance, le Président Obama recevait le directeur général de Lockheed Martin (un fabricant d’armes) exactement au même moment où Mr. Rahman et ses enfants racontaient l’injustice commise contre eux tous grâce à l’exécution bâclée d’une arme américaine.

Nabeela n’est pas Malala.

Malala Yousafzai a presque été assassinée par les Talibans Comme telle, les médias occidentaux et les diffusions politiques pro-guerre ont décidé de la propulser comme une fille qui se manifestait en faveur de leur cause. Cependant, au lieu de réellement applaudir la fille pour son héroïsme, les plaideurs et les partisans de la guerre ont considéré Malala Yousafzai comme un outil potentiel de propagande politique. Ils ont présenté Malala comme une victime – quelqu’un qui avait besoin d’être sauvé. Comme résultat, en utilisant l’exemple de Malala, les bellicistes pouvaient justifier à propos leurs actes et servir de vitrine aux Drones prédateurs comme symbole de liberté. Vous souvenez-vous de ce slogan ? Les Drones tuent pour que Malala puisse vivre !

C’est exactement la raison pour laquelle les propagandistes décidèrent d’ignorer la vérité.  . Max Fisher, écrivant pour le Washington Post, décrit la situation comme ci-dessous :

La servilité occidentale pour Malala est devenue moins au sujet de ses efforts pour améliorer les conditions des filles au Pakistan, ou certainement au sujet des luttes de millions de filles au Pakistan et plus au sujet de notre propre désir de nous sentir chaleureux et flous avec une célébrité et un message facile. C’est un moyen pour nous libérer nous-mêmes de notre responsabilité, en nous convainquant nous-mêmes que c’est simplement une question de bons contre des mauvais, que nous sommes du bon côté et que tout est OK.

Et qu’en est-il avec Nabeela Rahman? Eh bien, son cas montre l’autre côté du tableau : la vérité lamentable derrière les meurtres extra-judiciaires, la torture et les frappes de drones. Mais on ne peut pas lui accorder la même sympathie dont on comble Malala – dans une guerre, ses propres victimes doivent être ignorée, alors que les victimes de l’ennemi doivent être soulignées. C’est pourquoi, aussi inéquitable que cela paraisse, Nabeela ne recevra pas de prix, et il n’y aura pas d’audience où elle parle, et, bien sûr, il n’y aura pas de célébrités désireux de partager la scène avec elle. D’autre part, on continuera à considérer Malala comme l’affiche de fille de facto, et on racontera son histoire une quantité innombrable de fois, simplement pour justifier les sorties de l’OTAN en Asie. Aussi bizarre que cela puisse paraître, la logique de « Le fardeau de l’homme blanc » de Rudyard Kipling peut être appliquée ici aussi – la seule raison pour laquelle le monde est fou de Malala et pas de Nabeela c’est parce que la première est présentée comme une victime, alors que la seconde ne l’est pas.

En tout cas, alors que le reste du monde se pâmait avec les paroles de Ms Yousafzai, j’étais occupé à écouter le témoignage d’une petite fille de 10 ans, qui avait perdu son bonheur sans que ce ne soit de sa faute : Quand j’entends qu’ils poursuivent des gens qui ont fait du tort à l’Amérique, alors quel tort lui ai-je causé ? Quel tort ma grand-mère lui a-t-elle causé ? Je n’ai rien fait de mal.

Au sujet de l’auteur :  Sufyan bin Uzayr est un auteur publié et l’Editeur du The Globe Monitor (http://theglobemonitor.com). Il écrit pour plusieurs publications imprimées et en ligne, et régulièrement des blogs sur des questions d’intérêt contemporain sur Political Periscope(www.politicalperiscope.com). On peut aussi se connecter avec lui en utilisant Facebook  (http://facebook.com/sufyanism) ou Google+(https://plus.google.com/+SufyanbinUzayr?rel=author) ou lui  emailer sur  sufyan@politicalperiscope.com